Ils accusent leur beau-père de viols à Saint-Flour (Cantal) : « Je n'étais en sécurité nulle part dans la maison »
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Depuis 2017, les deux enfants dénoncent des abus sexuels allant jusqu’au viol de la part de leur beau-père, renvoyé devant la cour d’assises du Cantal. Le sexagénaire encourt vingt ans de réclusion criminelle.
Ils ont parlé. Voix forte et claire, parfois coupée par un sanglot pour elle, lui hésitant, parfois courbé sur la barre, ils ont énuméré, face à la cour, ce qu’ils reprochent à leur beau-père, de 2006 à 2014, pendant leur enfance. L’accusé, ancien haut fonctionnaire, 62 ans, incarcéré depuis juin 2018, est renvoyé devant les assises du Cantal pour plusieurs viols sur des enfants, dans sa belle-famille.
Tout commence dans leur première maison, avant 2011, avec des caresses sur tout le corps. Cela continue, avec des objets pointus, la main. Pour elle, les lèvres, ou en soufflant, « un air chaud et humide », puis, à ses 12 ans, les premières pénétrations, avec des objets, ou les doigts. Elle déconnecte, caresse le chat, regarde son portable, entends de loin ses conseils :
« Il voulait nous faire plaisir, il nous demandait de l’aide. C’est dégueulasse, ignoble, immonde, hurle-t-elle. Il se foutait de notre plaisir ! »
Pour lui, l’accusé prodigue des masturbations, des fellations. Pour lui comme pour elle, ça se termine sur une jouissance mécanique, puis il s’en va, sans un mot. Eux referment une parenthèse jusqu’à la fois suivante, des gestes devenus habituels, qu’ils peinent à comprendre, dans un foyer heureux par ailleurs, où l'accusé est apprécié.
La durée pendant lesquels les faits se seraient déroulés interpelle. La seconde épouse de l’accusé, mère de deux victimes, l’assure : elle n’a rien vu venir. Dans la maison familiale, sur trois niveaux, les planchers craquent, pourtant. Les enfants le disent : ils savaient quand il arrivait. Mais depuis son premier divorce, elle est sous antidépresseurs et anxiolytiques, elle a le sommeil lourd : même lors de terreurs nocturnes, sa fille ne parvenait pas à la réveiller. Enfin, son mari « était un grand fumeur, il se relevait la nuit, explique-t-elle. Je ne sais pas si, dans la salle, quelqu’un peut penser que son mari se lève pour aller violer les enfants… » A posteriori, elle voit dans toutes les petites attentions qu’il prodiguait des « stratagèmes » pour se retrouver seul avec les petits. Aujourd’hui, « je pense que je lui ai apporté les enfants sur un plateau. » Et jamais ils n'ont dénoncé les faits. « Il leur disait : “votre mère est fragile, il ne faut pas la tracasser”. Je pense que c’était eux qui faisaient attention à moi, et pas le contraire… »
La fréquence des faits interpelle. L’homme ne vit à la maison que les fins de semaine et cela se déroulait au « minimum six fois » par week-end, avec elle et avec son grand frère. Toujours au gré des opportunités : « Je n’étais en sécurité nulle part », dit-elle.
Les deux finissent par lui demander d’arrêter, il s’exécute. Hier, l’accusé a reconnu une partie des faits, mais estime avoir commencé plus tard, que la fréquence est exagérée. « Avouer des choses fausses, ce n’est pas leur rendre service. Cela peut être extrêmement destructeur. » Il reconnaît pour la première fois une pénétration sur garçon.
Mais impossible d’expliquer pourquoi il faisait ça. Il peine à entendre les questions, répond souvent à côté, se contredit parfois. « C’est complètement déviant. Je n’en avais pas conscience, ce n’est qu’après la révélation des faits que j’ai réalisé ce travail. » Un travail qu’il avoue lui-même n’avoir pas su terminer depuis son incarcération, en juin 2018.
Pierre Chambaud