L'oncle nivernais de Jana, emmenée en Syrie quand elle avait 3 ans, affirme l'avoir retrouvée en Turquie

Quand il l’a vue pour la dernière fois, à la gare de Nevers, le 16 août 2014, elle avait 3 ans. Le Nivernais Mostafa Tarbouni assure avoir enfin retrouvé sa nièce, Jana, à Istanbul, où il se trouve depuis plus d’une semaine.

Il y a neuf ans, la fillette avait été emmenée en Syrie, par son père, Eddy Leroux, et la nouvelle compagne de celui-ci, Jihane Makhzoumi. Le couple, radicalisé, avait rejoint le califat instauré par Daesh. Le père a probablement été tué quelques mois plus tard (sa mort n’a jamais été confirmée) et sa compagne est rentrée en France avec ses enfants, mais pas Jana. En novembre 2019, elle a été condamnée à quatorze ans de réclusion criminelle par la cour d’assises spéciale de Paris.

Depuis ce funeste jour d’août 2014, Mostafa Tarbouni n’a jamais cessé, d’abord d’entreprendre des démarches pour faire revenir sa nièce en France, puis, quand sa trace a été perdue, de la chercher. En mars 2019, il s’est même rendu jusque dans des camps de réfugiés en Syrie. Sans parvenir à la retrouver.

Mais c’est en Turquie qu’il l’a finalement localisée, cet été. "J’ai fait un premier voyage en juillet, pour trouver l’endroit où elle était. Et j’y suis retourné, cette fois-ci avec ma sœur Ilham, la mère de Jana, le 18 septembre. Le 21 septembre, je l’ai rencontrée et récupérée. Nous sommes allés au consulat. Aujourd’hui, Jana est à l’abri, avec sa mère. Mais nous sommes encore en Turquie et nous n’avons pas le feu vert pour la ramener en France", assure-t-il ce jeudi soir.

Selon son témoignage, Jana était avec une adulte, une femme dont il n’a pas dévoilé la nationalité. "Elle n’est pas Turque et ne parle pas turc", précise-t-il. "Il a fallu négocier pendant 24 heures. Ce n’était pas facile, Jana était attachée à cette femme. Qui a cependant accepté de la rendre, quand elle a su que sa mère était là."

Sur les retrouvailles entre Ilham Tarbouni et sa fille, il ne s’étend pas trop. Il parle de moments "compliqués", mais assure que petit à petit, Jana noue des liens avec sa mère. "Elle n’avait aucun souvenir de ses parents. On lui a raconté beaucoup d’histoires sur sa mère, sur la France… Moi, j’ai pris le temps de lui raconter sa vraie histoire. Elle parle toujours le français. On l’a cachée pendant des années, elle portait le niqab (voile intégral couvrant le visage à l’exception des yeux, ndlr). Elle a 12 ans aujourd’hui, c’est encore une enfant. Elle rattrape petit à petit le temps perdu avec sa mère. Bien sûr, les traumatismes sont là. Je suis éducateur, c’est mon métier, j’essaye de l’aider. On constate des progrès tous les jours. Elle veut revenir en France."

Mostafa et Ilham Tarbouni ont hâte de rentrer, avec Jana. Mais ce n’est pas simple. "Un test ADN a été fait pour attester qu’il s’agit bien d’elle. C’est normal, c’est la procédure, même si nous n’avons aucun doute, car elle ressemble trait pour trait à sa mère et elle a le signe distinctif que nous avions signalé, une tache de naissance en haut d’une cuisse. On attend le résultat du test."

L’oncle de Jana répète qu’il est resté transparent avec les autorités françaises. "Le Quai d’Orsay a toujours été au courant de mes recherches. Je peux certifier que c’est elle, c’est Jana Leroux, ma nièce, une fille de la République française. Elle est partie quand elle avait 3 ans, elle n’a pas porté les armes, elle n’a rien fait. Au contraire, elle a subi tout cela, la guerre, les camps. Il faut qu’elle rentre. J’ai hâte que tout ça se termine."

Jean-Mathias Joly