Représentativité patronale: le Medef et la CGPME ont trouvé un accord, colère des artisans
Après des mois de conflit, le Medef et la CGPME ont indiqué vendredi avoir trouvé un compromis sur la question explosive de la représentativité patronale, provoquant la colère des artisans et des professions libérales qui ont dénoncé un accord conclu en "catimini".
Cet accord prévoit de panacher à 80% le nombre de salariés et à 20% le nombre d'entreprises adhérentes aux syndicats patronaux pour mesurer leur représentativité, a-t-on appris auprès du Medef et de la CGPME.
Selon ces sources, l'UPA (qui représente les artisans) n'a pas souhaité être associée à cet accord.
"Nous n'avons pas été associés à une quelconque concertation", a démenti Pierre Burban, secrétaire général de l'UPA, interrogé par l'AFP.
"Ce n'est pas acceptable", s'est-il insurgé, dénonçant un accord "en catimini" et indiquant que la dernière réunion tripartite, incluant l'UPA, avait eu lieu le 17 novembre.
"La concertation, elle s'est faite entre deux personnes, Pierre Gattaz et François Asselin", respectivement à la tête du Medef et de la CGPME, a confirmé Michel Chassang, le président de l'Unapl (professions libérales).
A partir de 2017, la mesure de l'audience des organisations patronales sera en effet nécessaire pour la répartition des sièges dans les instances paritaires et celle des fonds de financement du paritarisme.
Or, selon une loi du 5 mars 2014, il était prévu de mesurer cette audience à l'aune du nombre d'entreprises adhérentes, sans pondérer ce chiffre par leur nombre de salariés ou leur chiffre d'affaires. Les effectifs des entreprises devaient eux être pris en compte lors de l'extension d'un accord collectif, avec la création "d'un droit d'opposition majoritaire".
Cette question avait divisé les syndicats patronaux, ce mode de calcul étant nettement défavorable au Medef, qui représente principalement les grandes entreprises, par rapport à la CGPME et l'UPA.
Face à ces désaccords, le gouvernement avait voté un amendement durant l'été leur demandant de s'entendre rapidement sur les critères de répartition.
- La balle dans le camp du gouvernement -
"Ni le pays, ni les entrepreneurs, et encore moins les entrepreneurs de petites et moyennes entreprises n'ont envie de voir un patronat se déchirer", a déclaré à l'AFP François Asselin, président de la CGPME.
"Il vaut mieux se mettre autour de la table et faire en sorte d'atterrir sur un +gentlemen agreement+", a-t-il estimé, disant préférer qu'un accord soit trouvé par les organisations elles-mêmes, plutôt que de se voir imposer une règle par le gouvernement.
"Nous voulons être dans une logique constructive et qu'on tourne cette page", a-t-on aussi indiqué au Medef.
Pourtant, l'organisation présidée par Pierre Gattaz avait porté la bataille sur le front constitutionnel via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), réclamant d'annuler un article d'un décret portant sur la mise en oeuvre de la représentativité patronale.
Mais le Conseil Constitutionnel a débouté mercredi le Medef.
L'accord avec la CGPME a été trouvé avant la réponse du Conseil constitutionnel, a indiqué à l'AFP M. Asselin.
Pour Michel Chassang, de l'Unapl, désormais "la balle est dans le camp du gouvernement".
En principe, la ministre du Travail, Myriam El Khomri, "doit mettre une ligne dans sa loi" à ce sujet, a-t-il déclaré.
"Est-ce qu'elle va pouvoir mettre une ligne contraire à la décision du Conseil constitutionnel, je n'en suis pas certain", a-t-il dit.
"Est-ce que de toutes façons, si elle met quelque chose qui semble contraire au Conseil constitutionnel, d'autres ne feront pas le même recours, en particulier l'UPA et nous-mêmes, c'est la question", a-t-il ajouté.
Le président de l'Unapl a par ailleurs dénoncé des "accords sur des coins de table, qui découlent précisément d'organismes influents qui sont à la fois membres du Medef et de la CGPME".
Il a affirmé que la fédération de la métallurgie (UIMM), ou encore la Fédération française du Bâtiment (FFB) - adhérentes aussi bien au Medef qu'à la CGPME - avaient fait "pression" sur la CGPME pour qu'elle accepte un tel accord, faute de quoi elles la quitteraient.
Interrogé par l'AFP, le numéro un de la CGPME, François Asselin, a vivement démenti cette affirmation. Cela s'est "fait sans la pression de qui que ce soit", a-t-il déclaré.
"A la CGPME, on a pris notre décision en toute responsabilité avec l'ensemble de nos présidents de région", a-t-il déclaré, assurant que de nombreuses branches "multi-adhérentes" avaient "validé et adoubé" cet accord.