Venezuela: la monnaie plonge, la constituante suit son cours

Le projet controversé de modification de la Constitution au Venezuela est entrée mercredi dans le vif du sujet avec le début de l'inscription des candidats à l'assemblée constituante, alors que le bolivar plongeait de 64,13% face au dollar dans ce pays en crise.

L'élection des constituants qui auront la tâche de rédiger une nouvelle Constitution doit avoir lieu fin juillet.

Ce processus, lancé par le président socialiste Nicolas Maduro, fait parti des griefs de l'opposition qui manifeste de manière quasi quotidienne depuis le 1er avril. Au cours de ces défilés, 60 personnes sont mortes et un millier ont été blessées, selon un bilan récent.

Les deux camp s'accusent réciproquement d'envoyer des groupes armés dans les manifestations pour semer la violence.

jeudi, la vague de protestation pour exiger le départ du président et de nouvelles élections entrera dans son troisième mois.

"Le pays est en train d'emprunter le chemin de la constituante, c'est un grand jour (...) Allez vous inscrire, candidats et candidates à l'Assemblée nationale constituante!", s'est félicité M. Maduro mardi soir à la télévision d'Etat VTV.

Mais le site du Conseil national électoral (CNE), où doivent se faire les inscriptions, n'était pas accessible mercredi à la mi-journée.

De leur côté, les adversaires du gouvernement ont annoncé qu'ils ne participeraient pas à la constituante car ils considèrent comme "frauduleux" le système électoral prévu pour désigner les membres de cette assemblée.

Henrique Capriles, un des principaux dirigeants de la MUD, la coalition d'opposition, a prévenu que toute inscription d'un antichavistes (du nom du défunt ex-président Hugo Chavez, 1999-2013) serait considérée comme une "trahison".

Après une nouvelle manifestation mardi, les opposants au président socialiste tentaient mercredi de marcher vers le siège du ministère des Affaires étrangères, dans le centre de Caracas.

Mais comme à chaque fois ou presque, des camions anti-émeutes, des jets d'eau et des gaz lacrymogènes les empêchaient de progresser. Des groupes de jeunes répliquaient avec des projectiles et des cocktails Molotov.

- "Prolonger le coup d'Etat" -

En parallèle au coeur de la capitale, zone considérée comme le bastion du pouvoir, les partisans de Nicolas Maduro se mobilisaient en soutien à la constituante.

Sur la scène internationale, un mini-sommet des ministres des Affaires étrangères sur la crise vénézuélienne se tenait mercredi au siège de l'Organisation des Etats américains (OEA), à Washington. Le Venezuela a récemment annoncé son départ de l'instance régionale.

Par ailleurs, Julio Borges, le président du Parlement, seul pouvoir public contrôlé par l'opposition, a demandé mercredi à Bruxelles à son homologue du Parlement européen, l'Italien Antonio Tajani, la mise en place de sanctions contre le régime de Nicolas Maduro.

Pour lui, la proposition du chef de l'Etat d'établir une assemblée constituante ne vise qu'à renforcer son régime autoritaire et ne ferait qu'accroître la violence.

"L'idée d'une assemblée constituante n'est rien d'autre qu'une façon de prolonger le coup d'Etat au Venezuela", a affirmé M. Borges.

Les anti-gouvernement rendent M. Maduro responsable de la crise économique et de la pénurie de nourriture. En face, le président socialiste estime que la crise est le fruit d'une conspiration soutenue par les Etats-Unis.

Mercredi, le cours du bolivar vénézuélien s'est établi à 2.010 pour un dollar contre 721 auparavant, soit une dévaluation de 64,13% face à la monnaie américaine, lors d'une vente aux enchères de monnaie américaine impulsée par le gouvernement pour contrer le marché noir de devises.

Au total, ce sont 24 millions de dollars qui ont été mis en vente, essentiellement à des entreprises pour l'importation de produits alors que le pays est confronté à une sévère crise économique, selon cette même source.

Ce système de vente aux enchères de dollars, annoncé en avril par le chef de l'Etat vise à contrer le marché noir, où le billet vert s'écoule actuellement à 6.000 bolivars l'unité, ce que M. Maduro attribue à la "guerre économique" du secteur privé pour précipiter sa chute.

Le Venezuela vit l'une des pires crises économiques de son histoire, asphyxié par la chute des cours du brut, source de 96% de ses devises. Son inflation, stimulée par les pénuries, est devenue totalement incontrôlable, à 720% cette année, selon le FMI.