Qu'est-ce que le beatmaking, cet atelier rare proposé au conservatoire de Tulle ?
Depuis septembre 2023, le conservatoire accueille dans ses murs un atelier de beatmaking. Une belle avancée pour la représentation du hip-hop.
Mercredi 20 mars après-midi, 15 h 30. Au conservatoire de Tulle, quatre élèves rentrent dans la salle, sourire aux lèvres, prêts pour l’atelier… de beatmaking. La discipline consiste à composer des morceaux instrumentaux, principalement pour le rap ou le R’n’B. William Brandy, professeur de saxophone au conservatoire de Tulle, assure l’atelier. « C’est mon moment préféré de la semaine ! », glisse-t-il en entrant dans la salle.
Les élèves présents, âgés de 12 à 15 ans, enfilent leur casque sur les oreilles et allument leur « MPC One », machine permettant de composer des rythmes. C’est parti pour une heure de travail.
Au cœur de la création« Pour les jeunes compositeurs, l’objectif est d’essayer de reproduire des morceaux instrumentaux avec leur "MPC", explique le professeur. En début de séance, chacun choisit un morceau qui lui plaît, et le travaille comme il le souhaite. J’essaye de ne pas trop intervenir dans le processus artistique, mais je suis là s’ils ont besoin d’aide technique. »Les élèves de l'atelier composent leurs morceaux sur la "MPC One".
Mayeul, élève du conservatoire, tente de reproduire un morceau du rappeur Népal. « Avant que je commence le beatmaking, je n’écoutais pas trop de rap, confie l’adolescent. Depuis que je suis à l’atelier, j’y ai pris goût. » En revanche, dans le cours de William, pas obligé de composer du hip-hop : certains élèves ont choisi de reproduire des morceaux de Nuit Incolore ou Moby.
Démocratiser la disciplineLe professeur, pratiquant le beatmaking depuis quatre ans, se réjouit de pouvoir animer un tel atelier. D’autant que le conservatoire de Tulle est un des rares à proposer du beatmaking à ses élèves. Selon le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep), en 2023, huit albums de rap figurent dans le top 10 des albums les plus vendus en France. La preuve irréfutable que le style musical est plus tendance que jamais. « Pourtant, j’ai l’impression que les élèves du conservatoire n’osent pas encore dire qu’ils écoutent du rap, estime William. C’est dommage parce qu’ici, on n’est pas là pour classer une musique au-dessus d’une autre : on peut aussi bien écouter Chopin que Damso ! Justement, l’objectif de l’atelier est de se détacher de l’image très élitiste que peut refléter le conservatoire. »
Parmi les plus grands beatmakers français, peu sont passés par une école de musique ou un conservatoire.
L’atelier de beatmaking existe depuis septembre 2023, et compte sept inscrits. Parmi eux, des profils variés : saxophonistes, pianistes ou trompettistes. Cependant, selon William Brandy, pas besoin d’avoir de l’expérience au conservatoire pour s’inscrire à l’atelier. « Avoir des connaissances en solfège est un avantage, mais ce n’est pas nécessaire, estime-t-il. Parmi les plus grands beatmakers français, peu sont passés par une école de musique ou un conservatoire. »
William espère voir prochainement de nouvelles têtes à l’atelier. En attendant, les quelques élèves déjà inscrits sont plus que ravis d’y participer. « Une heure, c’est trop court, regrette Léo en rangeant son matériel. Il nous faut plus de temps ! »
Samuel Purdy