Kev Adams se retrouve en maison de retraite !
Dans Maison de retraite, de Thomas Gilou, vous êtes Milane, un petit délinquant qui purge une peine de TIG* dans un Ehpad. Cette idée est la vôtre. Pourquoi ce choix ? J'y pensais depuis un certain temps, ayant toujours été proche de mes grands-parents. Les personnes âgées m'ont toujours fasciné et j'ai creusé le sujet, sur le thème de la façon de vieillir en France, ce que représente un Ehpad. Un de mes amis a été déterminant dans mon choix. Il m'a raconté son vécu de trois ans dans un Ehpad en me racontant une foule d'anecdotes.
"Mon grand-père Roger est décédé pendant le Covid"Avez-vous vécu des moments forts avec vos grands-parents ?J'ai toujours eu un attachement fort avec eux. Le film est dédié à l'un de mes grands-pères, Roger, qui est décédé pendant le Covid. J'ai toujours mes grands-mères que j'appelle au moins une fois par semaine. On discute, on rigole. Cette relation est capitale à mon équilibre. Cette transmission est, selon moi, la plus importante dans chaque famille. C'est la meilleure façon de connaître la vie avant notre arrivée sur terre. C'est au cœur du film, on rit, mais pas seulement.
Aviez-vous un lien fort avec votre papy Roger ?Né en Algérie, il est arrivé en France et était fier d'être Français. Papy avait envie de transmettre plein de choses, il adorait aller au spectacle, voir des pièces, des films... Il était très fier de moi. Papy me parlait souvent de son Algérie natale. Ce sont des conversations qui me manquent beaucoup. Quand il me racontait quelque chose, cela me transportait. C'étaient des moments de bonheur.
Gérard Depardieu campe un ex-champion de boxe plutôt grande gueule, mais un peu diminué. La scène où vous l'aidez à uriner a-t-elle été celle la plus difficile à jouer ?Ce fut un moment fort où l'on a pleuré de rire. Au-delà de cette anecdote, j'ai vécu des moments forts avec ce grand monsieur qui fait partie de ces acteurs qui m'ont donné envie de faire du cinéma. Pour moi, c'était inespéré de me retrouver avec lui sur un plateau de tournage. Complètement dingue de partager un film avec lui. Jouer avec Gérard Depardieu était l'un de mes rêves les plus forts.
"Gérard Depardieu m'a dit qu'il n'a jamais cessé d'être critiqué et que, malgré tout, cela ne l'a pas empêché de faire son boulot, de s'éclater dans les films. Pour lui, c'est important de rester une force de propositions, de savoir qui est le metteur en scène... Plein de conseils précieux."
Que retenez-vous de cette expérience, vous le "p'tit jeune" ?Il m'a dit de continuer d'être moi-même, d'être naturel, de ne pas écouter les critiques. Gérard Depardieu m'a dit qu'il n'a jamais cessé d'être critiqué et que, malgré tout, cela ne l'a pas empêché de faire son boulot, de s'éclater dans les films. Pour lui, c'est important de rester une force de propositions, de savoir qui est le metteur en scène… Plein de conseils précieux.
Maison de retraite porte un regard lucide et drôle sur le temps qui passe. Un résident dit à un moment : "Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé". Cela vous inspire quoi ?Il m'arrive de penser à la vieillesse, moi qui viens de passer les trente ans. Mais, pour moi, vieillir, ce n'est pas quelque chose de triste. C'est plutôt positif. Le plus intéressant, c'est cette filiation, j'en ai souvent parlé avec mes grands-mères. L'échange va dans les deux sens. Dans le film, les seniors apprennent beaucoup à ce jeune Milane que j'incarne. Mais ce dernier leur transmet aussi des choses. Comme un certain souffle de vie, de dynamisme, qui leur permet de ne pas avoir l'impression d'être abandonnés de la société, d'être des "fantômes".
On reproche parfois au cinéma de faire preuve de jeunisme, que des comédiens, et souvent des comédiennes, ne trouvent plus de rôles passés un certain âge...Je ne le crois pas. En revanche, je pense que le cinéma est de plus en plus snob, vis-à-vis des personnes âges, mais aussi des comédies. J'appelle cela du cinéma snobinard. Je pense que des artistes peuvent changer les choses, je souhaite en faire partie. Je suis fier d'être un artiste populaire, cela me permet de rencontrer tous les publics, dont les retraités. C'est un vrai bonheur.
"Scène ou écran, c'est toujours un rôle, une histoire à raconter." Photo La République du Centre.
"Vieillir est une étape de la vie, on doit en parler entre les générations. Cela dédramatise pas mal de choses. J'ai moi-même effectué un stage dans un Ehpad avant mon film, pour mieux comprendre le personnel, les pensionnaires. C'est un univers fascinant."
Malgré l'évolution de la société et du regard des uns et des autres, le poids de l'âge peut encore effrayer, du moins inquiéter. Il faut se dire que c'est une étape de la vie et que l'on doit en parler entre les générations. Cela dédramatise pas mal de choses. J'ai moi-même effectué un stage dans un Ehpad avant mon film, pour mieux comprendre le personnel, les pensionnaires. C'est un univers fascinant.
Dans Maison de retraite, le directeur est un escroc. C'est une exception.Bien sûr, il n'est pas du tout question de faire le procès des Ehpad où l'on vit très bien en général. Il reste juste quelques lieux où les personnes âgées peuvent être délaissées. C'était utile de pointer quelques dysfonctionnements, mais sinon, administration et soignants font un travail admirable. Il faut leur rendre hommage.
Et 2022, comment la voyez-vous ?Avec plein d'optimisme, que mon film apporte du baume au cœur aux personnes âgées, qu'elles aient du plaisir à retourner au cinéma avec leurs enfants, leurs petits enfants. Je compte aussi remonter sur scène, je prépare actuellement un nouveau seul en scène. Plein de choses se mettent en place.
*Travaux d'intérêt général
Maison de retraite, de Thomas Gilou. Avec Kev Adams, Gérard Depardieu, Jean-Luc Bideau, Marthe Villalonga, Mylène Demongeot, Daniel Prévost, Firmine Richard... Sortie en salles le 23 février 2022.
Olivier Bohin