« Avant, les gars se marraient quand je disais venir de la Creuse ; aujourd'hui, ils disent : "Ouah, c'est super ce que vous faites" »

Quand il est arrivé il y a dix ans à la direction de Creuse tourisme, Sébastien Debarge avait une grande mission à mener : travailler l’image du département. Il peut aujourd’hui partir avec le sentiment du devoir accompli.

« J’étais directeur d’un office de tourisme dans le Périgord et lors d’un congrès à La Rochelle, j’ai une collègue du Limousin qui m’a dit : “Tiens, il y a un poste qui se libère dans la Creuse”. Je me suis dit : “Ouais, la Creuse…”. Puis j’ai regardé. Au centre de la France, c’était l’idéal pour voir la famille un peu dispersée, les enfants étaient petits et je m’étais mis au triathlon deux ans avant et il y avait un club à Guéret. Bref, il y avait des choses intéressantes à faire ici, touristiquement parlant et personnellement… » C’était il y a dix ans. Sébastien Debarge, passant outre les préjugés, arrivait ainsi à la tête de Creuse Tourisme.

La mauvaise image de la Creuse, il connaissait donc. Et ça sera d’ailleurs son premier gros chantier : « Travailler sur l’image du département. Et c’est ce à quoi je me suis attelé, tant en interne qu’en externe ».

Un vrai challenge qui n’a pas fait peur à ce professionnel du tourisme, arrivé jeune dans ce métier qui l’attirait par sa polyvalence : « Dans le tourisme, on touche à tout ». À son arrivée, se souvient-il, « plus de la moitié du budget com était consacrée à l’accueil de touristes. Assez rapidement, on l’a diminué pour mener à bien ce qui est notre cœur de métier : faire venir des gens dans la Creuse. Aujourd’hui, la production de brochures ne représente que 10 % du budget com. On a misé sur Internet, les réseaux sociaux, les vidéos puis les campagnes télé. »

« C’est tout ça qui a permis de faire décoller la notoriété du département. Il y a dix ans, quand j’arrivais sur une réunion et que je disais que je venais de la Creuse, les gars se marraient. La dernière fois, quand je me suis présenté comme le directeur de Creuse Tourisme, on m’a dit : “Ouah, c’est super ce que vous faites?!”. On a bien bossé. »

Ce gros boulot sur l’image de la Creuse restera forcément l’un de ses plus beaux souvenirs, même s’il ne s’en attribue pas tout le mérite. « Ce travail sur la notoriété a été rendu possible parce que les gens qui étaient là avant avaient fait leur boulot, les bases étaient là et notre pôle communication s’est bien étoffé, on a des gens passionnés. » Au quotidien, la tâche l’a occupé sans relâche. « En repérant les points forts, géographiques et humains. En mobilisant tous les acteurs comme on l’a fait pour La Creuse vue du ciel qui a marché du feu de dieu… Il faut être tout le temps à l’affût, saisir toutes les opportunités de communiquer. »

Ici, surtout, Sébastien Debarge a pu toucher à cette polyvalence du tourisme et de son rôle de directeur. « Il faut savoir travailler avec les élus. Moi, j’ai eu de la chance : les trois présidents successifs ont la Creuse chevillée au corps. Il faut une écoute mutuelle mais il ne faut pas avoir peur non plus d’amener des éclairages techniques en se détachant de la politique. On est là pour aider les élus à poser une vision stratégique. Et puis, il y a aussi tout le côté relationnel avec les partenaires, la gestion de l’équipe. Il faut beaucoup de conviction. » Dans cette Creuse dont « la position géographique centrale est un sérieux atout sur lequel miser », Sébastien Debarge a apprécié tout autant « les efforts faits par les élus en termes de connectivité » que « la qualité de vie très sympa » ou ces « gens extraordinaires » rencontrés au fil de ces dix années.

Professionnellement, il gardera en mémoire « la Grande traversée VTT qu’on a bossée en collaboration avec les EPCI et le service sport du Département et notre site internet unique : le Trophée que nous avons reçu est une belle reconnaissance et on a dépassé le million de visites sur notre site en une année?! ».

Il y a eu aussi toutes ces campagnes de com, décalée comme la vache Georgette « qui n’avait pas accroché tous les Creusois » ou cette première, ce clip sur une chaîne info nationale. Surtout il y a eu Des racines et des ailes qui « nous a clairement fait passer dans une autre catégorie ». En tout cas, dix belles années à redorer l’image d’un département, d’une Creuse devenue, qui l’aurait cru, tendance. L’image n’est pas d’Épinal non plus. À l’heure de partir, le directeur de Creuse Tourisme affiche un regret :

« Dans un département de 115.000 habitants avec 10 EPCI et 13.000 lits marchands, si on arrivait à avoir une structure unique pour gérer cette compétence tourisme, on serait les rois du pétrole. Ça serait un atout organisationnel inédit en France. J’aurais adoré le faire. »

Et il sait bien qu’il y a encore du travail à faire. « Il y a de beaux projets à travailler. Je pense qu’aujourd’hui, il faut retravailler l’offre. On manque de certaines catégories d’hébergements, qui marchent à la nuitée, pour attirer les touristes. On a aussi des propriétaires de gîtes qui vont cesser leur activité du fait de leur âge : sans lits, pas de touristes. Il y a un vrai enjeu à faire venir des investisseurs. »

À l’image de ce qui se fait à Aubusson??

« C’est indéniablement la ville qui a le plus de potentiel. Il y a déjà une dynamique enclenchée par la Cité mais si on va sur un programme de revitalisation urbaine – il y a vingt ans de boulot –  Aubusson sera une perle de la Nouvelle Aquitaine, une petite Sarlat-la-Canéda. »

Le parallèle n’est pas fait par hasard : c’est là que Sébastien Debarge va continuer sa carrière en tant que directeur de l’office de tourisme. 

Son coin préféré

« J’aime beaucoup les Monts de Guéret mais aussi tout le sud-est vers Auzances, Mérinchal, Crocq. Quand j’ai fait la reconnaissance de la Grande traversée en VTT, j’ai vu des coins magnifiques. Il y a ici des ambiances lumineuses qu’on ne voit pas ailleurs. »

Où fait-il bon vivre ?

« Retraité, je vous dirais dans le sud-est. Moi, j’ai vécu à Fleurat et c’est très bien aussi : j’étais dans un hameau tranquille à deux minutes de la 145. »

Où passer ses vacances??

« Tout dépend de ce que vous voulez faire. Je dirais le pays dunois, pour Crozant et la belle offre de VTT. »

Pour “sentir” la Creuse

« Il y a les incontournables : Crozant, Aubusson, Boussac aussi – il y a le château bien sûr mais c’est également une ville qui bouge – et les Monts de Guéret pour faire du sport. Et le sud-est… »

Le rendez-vous inratable

« La fresque de Bridiers. Je trouve que c’est formidable d’avoir quelque chose de si qualitatif. Ça m’a bluffé. L’effet ouaouh?! »

Creusois, fondu ou gâteau??

« Le fondu. Déjà, parce que je viens du Nord, alors les frites… Et je suis plutôt salé. Mais j’aime bien la tête de veau aussi. »

À table

« Mon restaurant fétiche, c’est Le Passe Muraille à La Souterraine. Selon mon épouse et moi, c’est là où l’on sert le meilleur fondu creusois. »

Ce qu’il a aimé ici

« Il y a une expérience qui m’a marqué ici au tout début. On va dans les Monts de Guéret pour faire des vidéos de VTT et d’un seul coup, je vois des mecs qui grimpent le Maupuy, un autre qui prend ses voiles… Les gens savent vivre, ils profitent de leur territoire. Il y a une ambiance particulière, très positive. C’est un territoire de passionnés, de gens qui ne s’économisent pas. Et, personnellement, je me suis régalé sur tout ce qui est sports nature. J’en ai pris plein les yeux. »

Et moins aimé??

« Parfois, il y a peut-être une réticence face à l’innovation. »

Séverine Perrier