Le "cerveau" gérait depuis sa cellule de prison : trois trafiquants d'héroïne et de cocaïne condamnés à Clermont-Ferrand

Comme c’est bien souvent le cas dans ce type de dossier, c’est un renseignement anonyme qui est à l’origine du démantèlement d’un réseau de trafic d’héroïne et de cocaïne, en novembre dernier, à Clermont-Ferrand.

Le 28 septembre, les policiers de la brigade des stups de la sûreté départementale reçoivent ainsi un appel les informant qu’un détenu du centre pénitentiaire de Riom, Sotiran Fistaj, un Albanais de 23 ans qui y purge une peine de six ans de détention, prononcée en 2020, pour trafic de stups, serait le « cerveau », depuis sa cellule, de l’organisation… d’un trafic d’héroïne et de cocaïne, mais aussi de transferts d’argent vers l’Albanie ou encore de voyages vers le sud de France, a priori destinés à se réapprovisionner en drogues.

Il donnerait ses ordres, via un téléphone portable, à une poignée « d’interlocuteurs privilégiés », parmi lesquels deux compatriotes installés à Clermont-Ferrand, Amarildo Sengla, 29 ans, et Alfred Jakaj, 40 ans.

Après des semaines de minutieuses investigations, destinées à définir les rôles des uns et des autres, les enquêteurs interceptent, le 23 novembre, rue Niel, à Clermont-Ferrand, un Volkswagen Touran conduit par Alfred Jakaj. Il revient de Rotterdam, aux Pays-Bas, où on vient de lui demander, moyennant 200 euros, d’aller y chercher « des sacs de terreau » ! Qu'il devait ensuite remettre « à un enfant, près d'une église »...

Si un sac en papier est bien présent devant le siège passager, ce n’est pas de la terre végétale qu’il contient, mais bien des sachets en plastique thermosoudés renfermant 4,1 kg d’héroïne et 1,1 kg de cocaïne.

Peu après, une perquisition est menée dans l’appartement qu’occupe Amarildo Sengla rue de Colmar, dans le quartier de la gare, toujours à Clermont-Ferrand. À l’arrivée des policiers, le suspect jette un téléphone portable par la fenêtre, avant que les enquêteurs, une fois dans le logement, ne découvrent près de 240 g d’héroïne dissimulés dans une paire de baskets.

« Malgré les explications bien peu convaincantes des trois prévenus, les faits sont bel et bien là, parfaitement établis par l'enquête des policiers ».

Jugés, ce mercredi, en renvoi de comparution immédiate, devant le tribunal correctionnel clermontois, les trois complices ont affirmé ne pas se connaître et nié, parfois en dépit des évidences, toute implication dans ce trafic.

Ces dénégations n’ont pas convaincu le procureur de la République, Thibault Fouris. Estimant que les trois prévenus « sont totalement impliqués », il a requis des peines de dix-huit mois à neuf ans de prison.

« Ce dossier aurait mérité l'ouverture d'une information judiciaire. Quand on requiert une peine digne d'une cour d'assises, on doit au moins laisser au prévenu les moyens de se défendre comme il le ferait devant une cour d'assises ! ».

Les avocats de la défense – Mes Mohamed Khanifar, Salomé Degoud et Laure Vaillant – ont ensuite tenté, à l’inverse, de démontrer l’absence ou la fragilité d’éléments permettant de mettre leurs clients en cause dans ce trafic. En vain.

Sotiran Fistaj a été le plus lourdement sanctionné, écopant de huit ans ferme. Alfred Jakaj a été condamné à cinq ans et Amarildo Sengla, à deux ans. Tous ont été maintenus en détention et font l'objet d'interdictions définitives du territoire français (mesure visant déjà le premier nommé depuis sa condamnation de 2020).

Christian Lefèvre