Qu'est-ce que le Gus, ce fauteuil roulant gyroscopique créé et fabriqué dans l'Allier ?
Philippe Cardoso et Pascal Malvezin ont créé un fauteuil roulant gyroscopique innovant, le Gus. Léger et accessible financièrement, il est fabriqué à Vallon-en-Sully (Allier).
Un fauteuil roulant de 63 kg, 63 cm de large, pliable, qui peut tourner à 360°, capable de parcours 25 km sans recharge et offrant une autonomie de déplacement à ses utilisateurs… Ce fauteuil existe déjà. Il a été inventé dans l’Allier. L’entreprise qui le conçoit, GusNgo est installée à Vallon-en-Sully.
Le Gus, gyropode sur lequel on peut s’asseoir, est né dans l’esprit de Philippe Cardoso. L’histoire a commencé en 2015. Lors d’un salon de maires, Philippe Cardoso et Pascal Malvezin, son beau-père, échangent avec un responsable de Michelin qui cherche une solution pour que les salariés puissent se déplacent entre les différents sites de l’entreprise d’une manière plus efficace et plus économique que d’utiliser une voiture.
Une idée bricoléePhilippe Cardoso s’attelle à la tâche pour le manufacturier clermontois. En testant des gyropodes debout, le jeune homme se rend vite compte des limites de l’objet. La créativité de cet électricien entre en action.
Ils avaient des autonomies intéressantes mais lorsque j’ai fait 20 km debout avec les cahots, j’avais les genoux en compote. J’ai pris mon vieux tabouret, j’en ai coupé un bout pour l’installer sur le gyropode et j’ai retravaillé le guidon. Je l’ai testé. Je pouvais passer des obstacles comme les rebords de trottoir sans souci.
Les problèmes de santé de Pascal vont accélérer les recherches de Philippe. Quatre mois après le salon des maires, Pascal Malvezin est transporté en urgence à l’hôpital. On lui diagnostique entre autres cinq hernies discales. Craignant de finir paralysé, il refuse l’opération. Pendant son séjour, Pascal Malvezin est obligé d’utiliser un fauteuil roulant manuel pour descendre fumer sa cigarette. Avec ses problèmes aux épaules, l’objet est trop lourd et il peine à le manipuler. L’hôpital n’a pas de fauteuil électrique, trop cher.
Pascal Malvezin est le premier utilisateur du Gus.
Pascal se souvient alors de l’invention de son gendre. "Avec un voisin bricoleur, j’ai décidé d’améliorer le gyropode pour qu’il soit plus confortable. On a pris un siège de tondeuse. Mon voisin a créé une structure métallique pour le poser. Je l’ai amené discrètement à l’hôpital. Pascal s’en est servi."
Tout le monde était interpellé. Au fur et à mesure que l’on avançait, les gens étaient de plus en plus nombreux autour de nous. Dans la cour, entre dix et quinze personnes nous regardaient. L’une d’elles nous a demandés : “Vous l’avez achetée où cette machine ?” Pascal a répondu du tac au tac : “On ne l’achète pas, on le fabrique !
Répondre aux difficultés rencontrées avec les autres fauteuilsAprès cet épisode, les deux hommes trouvent des investisseurs. L’aventure Gus est lancée avec une idée précise de ce qu’ils veulent faire.
Nous avons établi notre cahier des charges. Notre invention devait résoudre les difficultés que l’on rencontre avec les fauteuils roulants manuels et électriques. Nous voulions quelque chose d’électrique, de maniable, d’autonome, de compact que l’on puisse utiliser à la maison sans avoir à faire des travaux de réaménagement, qui se plie pour rentrer dans une voiture…
"Grâce à l’un de nos investisseurs, nous avons beaucoup travaillé avec les ergothérapeutes de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches", met en exergue Philippe Cardoso.
Donner de la mobilitéL’objectif de l’inventeur et de son beau-père est de donner de la mobilité aux personnes âgées handicapées. "Les valides peuvent aussi utiliser le Gus. Les seules personnes auxquelles il n’est pas destiné sont celles souffrant de maladie cognitive, les tétraplégiques ou celles ayant des problèmes musculaires au niveau de la sangle abdominale."
Une fabrication française au maximumL’autre point auquel tenaient Philippe Cardoso et Pascal Malvezin était une fabrication en France avec le maximum de fournisseur français.
Le plus important pour nous était de trouver la personne capable de fabriquer un système d’auto-équilibre qui sécurise notre fauteuil, pour ne pas dépendre d’une autre entreprise. Nous l’avons trouvée en la personne de Jean-Marc Imbert.
L’électricien de Vallon-en-Sully va travailler six ans avec le créateur de Manosque. Une fois la carte électronique et tous les systèmes de sécurité créés, la production du Gus a pu commencer, avec vingt-cinq modèles produits. "La seule chose qui vient d’Asie est le téléphone portable qui a toutes les données du Gus et avec lequel on peut intervenir en SAV. On avait essayé de faire un téléphone nous-même avec une imprimante 3D mais le coût de fabrication était trop élevé", regrette Philippe Cardoso.
Philippe Cardoso travaille sur des nouveautés à ajouter à son fauteuil
Un prix maîtrisé et abordableLe prix est en effet un élément qui participe à l’attractivité du fauteuil gyroscopique de la société GusNgo. Un fauteuil roulant manuel coûte en 300 et 13.000 euros. Cette fourchette passe de 3.000 à 40.000 euros pour un modèle électrique.
Le Gus vaut 7.500 euros. C’est le prix sans aide de la Sécurité sociale. Nous sommes en discussion avec la ministre déléguée chargée des personnes handicapées (Fadila Khattabi, NDLR) pour que notre fauteuil soit pris en charge. Mais comme il est certifié avec des normes françaises et européennes, on a quand même des aides de la MDPH (maison départementale des personnes handicapées).
L’inventeur souligne que les propriétaires n’auront pas à faire des travaux pour réaménager leur maison, le Gus étant moins large qu’un fauteuil traditionnel.
Une nouvelle série va bientôt être fabriquée dans l’entreprise de Vallon-en-Sully. En plus de superviser cette production, Philippe et Pascal réfléchissent aux nouveautés qu’ils pourraient ajouter aux prochains modèles du Gus.
La société GusNgo a obtenu le trophée Innovation produit pour son fauteuil lors du salon Silver Eco, à Cannes, les 18 et 19 septembre.
Florence Farina : texteFlorian Salesse : photos