Un réseau de stupéfiants démantelé dans l'Allier : les neuf prévenus condamnés par le tribunal de Montluçon
Les neuf personnes poursuivies pour trafic de stupéfiants à Commentry ont été jugées en comparution immédiate par le tribunal de Montluçon (Allier), lundi 15 avril jusqu'à tard dans la nuit. Les condamnations vont de deux ans avec sursis à quatre ans de prison.
Le tribunal judiciaire de Montluçon a jugé en comparution immédiate une affaire désignée comme "hors norme" par le procureur de la République, Christian Magret, lundi 15 avril. Le box de la salle Robert-Badinter était trop petit pour accueillir les neuf prévenus et les nombreux gendarmes qui les escortaient. Sept des neuf prévenus ont dû rester dans la salle, alors que le public devait suivre les débats sur un écran dans la salle Simone-Veil.
Ces neuf personnes étaient poursuivies pour un trafic de stupéfiants - certains en état de récidive - qui se serait déroulé à Commentry du 1er janvier au 9 avril, date de leurs arrestations par les gendarmes de la compagnie de Montluçon suite à une longue enquête. Tous ont été condamnés par les juges tard dans la nuit, après plus de dix heures d'audience.
Un milieu où tout le monde se connaît à CommentryÀ la barre, les prévenus ont reconnu la grande majorité des faits mais en minimisant l'ampleur du trafic. Tous sont consommateurs de cannabis ou de cocaïne, voire les deux, tous se connaissent et savent où trouver des produits en cas de besoin. Ils revendent ou font la nourrice, au gré des rencontres, d'éventuelles demandes et surtout de leur situation financière.
Considérés comme les deux revendeurs principaux, Sébastien Aguillaume et Alexandre Tournadre ont expliqué avoir commencé à revendre pour rembourser une dette pour le premier et par absence totale de ressources pour le second. Les deux hommes paient leur propre consommation directement sur le produit, tout comme John Conchon qui sert de nourrice.
Une organisation contestéeDésigné comme le chef du réseau par les autres prévenus, Maxime Moujard a réfuté ces accusations. Le Commentryen de 19 ans - le seul dont le casier judiciaire est vierge - a juste admis la détention d'une arme à feu et les menaces sur un autre prévenu auquel il aurait prêté de l'argent. "Je n'ai jamais rien organisé. Je transmettais des messages. On m'appelait", a-t-il évoqué à la barre
Les autres ont également contesté la notion de trafic. Ils ont évoqué du "dépannage", justifiant ce terme par l'absence d'enrichissement personnel avec la vente de produits stupéfiants.
"Ce que vous appelez de la dépanne, c'est de l'offre ou de la cession pour nous. Ce sont les mêmes dispositions dans le code pénal."
Une enquête qui démarre avec un voisinage excédéDans ses réquisitions, le procureur de la République a utilisé à dessein le terme de "hors norme". En premier lieu pour décrire ce que les prévenus "infligeaient à leur environnement, à leurs voisins". Il cite Le Discours de servitude volontaire de La Boétie pour appuyer son propos.
"Entre méchants, lorsqu'ils s'assemblent, c'est un complot et non une société. Ils ne s'entretiennent pas, mais s'entrecraignent. Ils ne sont pas amis, mais complices. Dans ce dossier, c'est bien un complot car ils ne font pas société. Ils se volent, ils se rouent des coups."
Il a rappelé que l'enquête a débuté sur une dénonciation anonyme et "la clameur publique" de voisins excédés par l'insécurité qu' ont fait régner ce trafic et ses protagonistes dans un quartier de Commentry.
Entre un et quatre ans de prison requisLe procureur de la République a requis trois ans de prison avec révocation de son sursis probatoire de deux ans contre Sébastien Aguillaume ; trois ans de prison dont un an avec sursis contre Alexandre Tournadre et Jérôme Michard ; trois ans de prison contre Omar Mosly ; quatre ans de prison dont un an avec sursis pour Maxime Moujard ; deux ans dont un an avec sursis pour John Conchon et une Commentryenne de 37 ans ; deux ans de prison avec une révocation d'un sursis probatoire de deux ans contre Émilie Dumont ; trois ans de prison dont deux ans avec sursis pour Jean-François Deschemin.
Il a également requis le maintien en détention, des obligations de soins et de travail, l'interdiction d'entrer en contact avec les co-auteurs et paraître à Commentry pour l'ensemble des prévenus, à l'exception de Maxime Moujard dont l'interdiction est étendue au département de l'Allier et d'Omar Mosly au territoire national pendant huit ans.
Un dossier qui repose avant tout sur les auditionsLes sept avocats de la défense ont déploré que le terme "hors norme" était disproportionné au regard du dossier. "Hors norme au regard de la sévérité des peines requises", a répliqué maître Souef, qui défendait la mère de famille commnentryenne de 37 ans.
Comme ses confrères, elle a estimé que "le trafic est très surestimé". Tous les conseils ont pointé le manque de faits matérialisés, soulignant que le dossier reposait sur les écoutes et surtout les auditions des prévenus.
" Le seul caractère atypique est de la reconnaissance des faits par la quasi-totalité des prévenus. Les éléments matériels sont plutôt faibles."
"C'est un dossier virtuel car vous n'avez pas la moindre quantité. On fait des calculs scientifiques sur des écoutes", a insisté Maître Héas. "À part les écoutes, si les gens ne parlaient pas, vous n'aviez pas de preuves matérielles. Ce dossier n'est pas un gros dossier." Le conseil de Sébastien Aguillaume et Alexandre Tournadre ont mis en avant qu'il s'agissait d'un trafic visant à financer leur propre consommation.
Tous les prévenus reconnus coupablesAprès une longue délibération, le tribunal a reconnu les neuf prévenus coupables des faits qui leur étaient reprochés. La Commentryenne de 37 ans a été condamnée à deux ans de prison avec sursis. Elle est la seule qui n'a pas été maintenue en détention.
Jérôme Michard, Jean-François Deschemin et John Conchon ont écopé de deux ans de prison dont un an avec sursis. Un sursis de six mois dont Jean-François Duchemin avait bénéficié, dans une précédente affaire, a été révoqué.
Émilie Dumont a été condamnée à deux ans de prison. Un sursis de deux ans dont elle avait bénéficié suite à une précédente condamnation a été révoqué. Omar Mosly a été condamné à deux ans de prison et à une interdiction de paraître sur le territoire français pendant cinq ans.
Sébastien Aguillaume a écopé de trois ans de prison et de la révocation d'un sursis d'un an. Alexandre Tournadre a été condamné à trois ans de prison dont un avec sursis et enfin Maxime Moujard, à quatre ans de prison dont un avec sursis.
Tous ont des obligations de soins et de travail, l'interdiction d'entrer en contact les uns avec les autres et de paraître à Commentry, sauf Maxime Moujard dont l'interdiction s'étend à tout le département de l'Allier. Le Commentryen de 19 ans a également l'interdiction de détenir une arme pendant cinq ans.
Florence Farina