Les homosexuels italiens attendent avec amertume la loi sur leurs unions
Militants et sympathisants homosexuels italiens ont manifesté leur amertume et souvent leur colère mercredi dans la rue et sur les réseaux sociaux, alors que le gouvernement a négocié une loi a minima sur l'union civile.
"Honte, honte, honte", ont scandé des dizaines de militants mercredi soir non loin du Sénat, où le Parti démocrate (PD) de Matteo Renzi, après avoir échoué à faire passer le texte en l'état avec le soutien du Mouvement 5 Etoiles (M5S), a annoncé mercredi soir sur Twitter avoir obtenu un compromis avec ses alliés du centre-droit.
Ces élus catholiques ont déjà obtenu l'abandon de l'article permettant d'adopter l'enfant naturel de son conjoint. Selon la presse, ils ont obtenu d'autres changements jugés humiliants par les homosexuels comme le retrait de l'obligation de fidélité, mais ont accepté de maintenir la pension de réversion ou le permis de séjour pour le conjoint étranger.
Le Sénat devrait se prononcer jeudi, voire vendredi, sur un maxi-amendement ou sur une série d'amendements entérinant cet accord, sur lequel M. Renzi s'est dit prêt à engager la responsabilité de son gouvernement.
"Dans le cul, oui, mais comme ça, non", proclamaient plusieurs pancartes.
"Pour nous, une loi sur les unions civiles qui ne respecte pas nos enfants est une loi inutile, vide", explique à l'AFP Marilena Grassadonia, présidente de l'association Famiglie Arcobaleno (familles arc-en-ciel).
"C'est comme si nos enfants avaient disparu. Comme si, au moment de signer l'union civile devant le maire avec ma compagne, je me retourne pour faire la photo avec nos enfants et qu'ils sont devenus des fantômes", dénonce-t-elle.
"Nous sommes très déçus, très amers (...). Pour nous, mieux vaut rien du tout qu'une loi de ce type qui nous humilie", insiste cette mère de trois enfants.
Claudia Toscana, 71 ans, dont le fils homosexuel a trois enfants, parle elle aussi de "honte pour l'Italie": "Les politiciens font leurs petits jeux, leurs petites rivalités, tout ce qu'on espérait que pour une fois ils éviteraient".
- 'Un premier pas' -
"Et nous avons écouté les discours des sénateurs. Mais quels ignorants ! Nos destins sont dans les mains de quelques personnes vraiement indignes. Le problème est l'ignorance, les préjugés, pas le Vatican", insiste-t-elle.
Sur Facebook, son fils Claudio Rossi Marcelli, installé au Danemark avec sa famille, a expliqué ressentir "une sensation étrange: avant nous n'existions pas, maintenant au contraire nous existons mais nous valons moins que tous les autres".
Les critiques sont d'ailleurs vives sur les réseaux sociaux, où au-delà d'une bataille d'arguments sur la responsabilité respective de M. Renzi, du PD et du M5S dans ce revers, pointe surtout l'amertume de voir que l'Italie restera loin derrière la plupart de ses partenaires européens.
"Une société qui humilie n'est pas une société décente, et l'Italie, aujourd'hui, humilie les personnes homosexuelles", écrit la philosophe Michela Marzano, député PD tentée par la démission.
"Au point où on en est, je m'attends à une loi qui commence par +Je n'ai rien contre les gays, mais...+ et se termine par +j'ai d'ailleurs plein d'amis gays+", ironise un internaute. "Prévenez-moi quand nous serons devenu un Etat laïc", lance un autre.
"Je voulais informer nos politiciens pernicieux que les enfants des couples homoparentaux continueront à exister. Bande de clowns", raille une internaute.
"Grâce à la loi, les gays auront maintenant des droits: apprendre l'anglais, l'espagnol ou le finlandais, faire leurs valises, émigrer", ironise une autre.
Au milieu des drapeaux arc-en-ciel et des pancartes devant le Sénat, Fabrizion Marrazzo, porte-parole du Gay Center, une association de défense des droits des homosexuels, est plus mesuré.
"C'est un sentiment doux-amer qui prédomine", explique-t-il. "Nous attendions une réponse positive à nos droits, et malheureusement il en manquera une partie (...). Mais ce sera un premier pas", espère-t-il.