La différence est une richesse!

Beaucoup le clament, mais très peu ne l'essaient en réalité. Pourquoi? Parce que la différence provoque d'abord des problèmes, des incompréhensions, des tensions, des ratés. Il ne faut surtout pas le nier. Pour devenir une force, elle doit être accompagnée d'une volonté à la fois pragmatique et farouche de réussir ensemble. Il est temps que notre société se réveille. Qu'elle cesse d'être figée soit dans la peur de l'autre, soit dans les discours bien pensants stériles.

Je suis intimement persuadé qu'un groupe est plus créatif, plus résistant, plus performant et plus heureux quand ceux qui le composent sont multiples. Mes convictions se sont forgées depuis 15 ans à travers mon expérience de skipper d'équipages d'hommes et de femmes tous différents. Mais elles viennent aussi, comme souvent, de ma propre histoire. J'ai grandi dans un monde protégé, lissé de ses différences. En façade. Un jour, j'ai entendu mon père m'avouer les souffrances qui avaient été les siennes enfant. Autour de lui, on n'acceptait pas que ses troubles émotionnels s'expriment à travers le bégaiement. J'ai compris que le monde n'était finalement pas si simple.

Je n'en peux plus des propos bien pensants, soi-disant civiques ou humanistes, qui entendent protéger les minorités, mais qui les marginalisent tout autant que les discours de peur et de haine. Je n'en peux plus d'entendre que la société fait tout ce qu'elle peut, mais que cela prend du temps de faire évoluer les mentalités. Je n'en peux plus de voir des responsables politiques si peu représentatifs de la diversité du peuple. Je n'en peux plus des femmes moins payées que les hommes. Je n'en peux plus des talents inutilisés à cause de leur patronyme. Je n'en peux plus des personnes handicapées jugées incapables. Je n'en peux plus de contempler notre société si obnubilée par la compétition et le superficiel, qu'elle en oublie la collaboration et l'essentiel, invisible aux yeux.

Nous devons apprendre à aller au-delà de nos différences visibles pour rencontrer nos ressemblances invisibles. Il est urgent d'inspirer l'envie d'aller vers l'autre, d'enseigner très tôt la confiance. D'accepter de se tromper et de se donner du temps pour réussir. Si notre société veut répondre aux grands enjeux de demain, nous devons nous mettre en chemin.

Nous y avons tous intérêt. Dans le monde du travail en premier lieu. La différence constitue une source insoupçonnée d'innovation, d'enrichissement collectif et de bien-être personnel. Bien entendu, elle complexifie les rapports humains. Travailler ensemble lorsqu'on est différent est un chemin long et difficile. Mais nous sommes tous singuliers et la clé de la performance durable c'est avant tout de rassembler des hommes et des femmes qui partagent les mêmes objectifs, le même sens de l'engagement et le respect de l'autre.

C'est pour amplifier cet appel que je m'engage sur le Vendée Globe. C'est sans doute une goutte d'eau. Mais si nous sommes des milliers, des dizaines de milliers, des millions, qui sait, à le signer, alors il symbolisera notre volonté de ne plus cautionner une mise à l'écart stupide de certains de nos concitoyens. Il montrera à nos dirigeants qu'ils doivent agir et montrer l'exemple. Il confirmera que nous cherchons tous à partager d'abord des fondamentaux qui n'ont rien à voir avec la couleur de la peau, l'origine, l'âge, le genre, le physique, l'orientation sexuelle...

Le réflexe animal de nous regrouper parce que nous nous ressemblons visiblement est une lourde erreur. Pour notre avenir commun nous ne pouvons pas nous recroqueviller dans l'entre soi. Nous devons, au contraire, nous ouvrir farouchement et pragmatiquement à la différence pour innover, réussir et être heureux.

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