La Colombie face aux défis de la mise en oeuvre de la paix
La Colombie a réussi à ratifier la paix avec la guérilla marxiste des Farc, mais doit maintenant relever les défis de sa mise en oeuvre pour clore le chapitre d'un conflit qui a fait des centaines de milliers de morts.
Le décompte a débuté jeudi: dans cinq jours à partir de ce "Jour J" les guérilleros doivent entamer leur ultime marche à travers les montagnes et les jungles de Colombie, pour rejoindre les 27 zones où ils vont déposer leurs armes et préparer leur retour à la vie civile.
La première étape sur la voie d'une paix effective consiste à permettre à ces combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) de se déplacer sans risquer d'être arrêtés par les forces de l'ordre.
Pour cela, le gouvernement prépare des mesures de grâce, dans l'attente du vote de la loi d'amnistie prévue par l'accord de paix.
"Le président de la République, le gouvernement, a la faculté d'octroyer des grâces en faveur de ceux qui ont commis des crimes politiques", a déclaré le Haut commissaire pour la paix, Sergio Jaramillo, jeudi lors d'une conférence de presse.
- Amnistie 'urgente' -
Soulignant que "la loi d'amnistie est urgente", le ministre de l'Intérieur, Juan Fernando Cristo, a précisé qu'elle serait présentée la semaine prochaine au Congrès.
Entretemps, le gouvernement espère que la Cour constitutionnelle aura donné son feu vert au mécanisme de "fast track" qui, en réduisant les débats parlementaires, permettra une approbation rapide des textes d'application du pacte avec les Farc, qui une fois désarmées, vont se transformer en parti politique.
L'accord, qui prévoit la fin du regroupement des guérilleros d'ici le 31 décembre et de leur désarmement d'ici six mois, a été approuvé mardi par les sénateurs, puis mercredi par les députés.
Après son rejet lors du référendum non obligatoire du 2 octobre, le texte, négocié pendant presque quatre ans avec les Farc, a été révisé pour y inclure des propositions de l'opposition, menée par l'actuel sénateur et ex-président de droite Alvaro Uribe.
Puis le chef de l'Etat Juan Manuel Santos a choisi la voie du Congrès afin que l'accord entre en application le plus vite possible.
"La situation actuelle du cessez-le-feu et de pré-regroupement de la guérilla est fragile", a argué le chef négociateur de paix du gouvernement, Humberto de la Calle, en référence à la mort de deux guérilleros et aux assassinats de leaders communautaires depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 29 août.
- 'Avancer rapidement' -
Le conflit armé, qui au fil des décennies a impliqué une trentaine de guérillas, des milices paramilitaires d'extrême-droite et l'armée, a fait au moins 260.000 morts, plus de 60.000 disparus et 6,9 millions de déplacés.
Le ministre de l'Intérieur a précisé, qu'outre la loi d?amnistie, le parlement examinera à partir de la semaine prochaine un paquet de projets de loi, incluant le texte sur la participation des Farc à la vie politique. "Nous espérons tous (...) avancer rapidement dans la démobilisation et le désarmement des membres des Farc", a ajouté M. Cristo.
Avant l'annonce des mesures de grâce, les Farc, principale guérilla de Colombie issue en 1964 d'une insurrection paysanne, avaient averti que leur quelque 5.700 combattants ne rejoindraient les zones de démobilisation qu'une fois l'amnistie votée. Jeudi, le Haut commissaire pour la paix a considéré que "les Farc ne peuvent introduire de nouvelles conditions à l'accord".
M. Santos, lauréat du prix Nobel qui a salué sa détermination à en finir avec la guerre, entend parvenir à une "paix complète", en négociant aussi avec l'Armée de libération nationale (ELN). Mais les discussions préparatoires avec cette guérilla, qui compte environ 1.500 combattants, sont en suspens et ne devraient reprendre que le 10 janvier pour définir la date de début des pourparlers de paix.