Un habitant de Creuse s'alcoolise et fait vivre une soirée cauchemardesque à un couple de nouveaux arrivants

Ce jeudi 3 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Guéret a condamné un homme de 32 ans à une peine de sept mois de prison avec maintien en détention pour des menaces de mort et des violences sous l'empire d'un état alcoolique à l'occasion de la pendaison de crémaillère d'un couple nouvellement arrivé en Creuse.

Nous sommes le 29 octobre, et un couple installé depuis la veille en Creuse invite ses voisins à une pendaison de crémaillère.

Les hôtes ne le savent pas, mais un de leurs invités a une problématique importante avec l'alcool. Il s'agit d'un homme d'une trentaine d'années, suivi par le Csapa (*) qui, a priori, ne boit plus depuis plusieurs mois. Mais ce soir-là, il craque. Il s'alcoolise à base de pastis "maison" et devient de plus en plus agressif. Il est ramené une première fois chez lui, mais revient en proférant des insultes et menaces. « Vous voyez l'Audi là, je vais vous rouler dessus avec ! » Il est à nouveau raccompagné chez lui, mais en revient avec un fusil. L'arme est décorative, mais son étalage couplé à l'agressivité du trentenaire ivre provoque une vive émotion. Il est raccompagné chez lui encore une fois, mais il ressort toujours plus agressif, muni cette fois-ci d'une batte de baseball dont il assène au moins un coup à son nouveau voisin. Deux hommes devront unir leurs efforts pour le maîtriser pendant deux heures en attendant l'intervention des forces de l'ordre. 

Ce jeudi 3 novembre dans le box de la salle d'audience du tribunal judiciaire de Guéret, le prévenu a la mine défaite. Il reconnait les faits, même s'il assure ne se souvenir que du début de cette soirée. « J'ai été invité à prendre l'apéro, je n'ai pas su dire non. Et j’ai pété un plomb », concède-t-il, avant de lâcher dans un début de sanglot, eu égard à son maintien en détention provisoire : « Ça va faire deux jours que je ne mange pas, je suis démoralisé ».

Présent à l'audience, la moitié masculine du couple nouvellement arrivé en Creuse, chauffeur routier de profession, a du mal à s'apitoyer sur le sort du prévenu. Sa famille a été choquée et sa femme a peur désormais. « Je n'ai obligé personne à boire... Il y avait cinq neveux à la maison : il y en a un qui a vomi à cause de ça (cette histoire, NDLR). » Puis s'agissant du prévenu : « Plus on le ramenait, plus il montait en hystérie. Nous ne voulons plus avoir affaire à lui ».

Son conseil Guillaume Viennois enfonce le clou, en référence à une tentative du prévenu, quelques instants auparavant, d'interrompre le témoignage de son client. « Il a commencé par pleurer un peu, mais quand ça le dérange, il peut couper la parole, il peut répondre. Alors avec une consommation forte d’alcool... », argue-t-il. « Et ce ne sont pas simplement les menaces de mort : que se serait-il passé si [mon client] n'avait pas pu l'arrêter, qu'est-ce que ça aurait été ? Même un suivi Csapa, ça n’excuse pas tout. »

D'autant que, comme le rappelle le président du tribunal Michael Humbert, le suivi par un centre spécialisé en addictologie a été mis en place dans le cadre d'un des deux sursis probatoires auquel il est astreint. « Votre casier fait apparaître 18 condamnations, dont beaucoup pour des faits de conduite sans permis. » 

La procureure de la République de Creuse, Alexandra Pethieu, aborde les conséquences de cette « soirée cauchemardesque » pour le couple de nouveaux arrivants : « Se projeter, ça va être difficile pendant des mois avec le souvenir de menaces, d’animosité, de délire alcoolique et de violences. » Compte tenu du « passé pénal » du prévenu, des « attentes déçues sur le plan judiciaire », elle estime qu'une peine plus ferme doit s'appliquer. « J’entends les regrets, mais ils arrivent trop tard et de manière inappropriée. » Elle requiert huit mois d’emprisonnement avec maintien en détention, interdiction de détenir une arme pendant cinq ans et interdiction de contact avec les victimes.

Pour l'avocat du prévenu, Maître Philippe Lefaure, « les excuses ne sont jamais trop tardives » et « quand il n'a pas bu, c'est une très bonne personne ». Il propose donc au tribunal de « prolonger [son] sursis probatoire, en lui imposant des soins qui sont indispensables ». Mais le tribunal n'est pas convaincu et s'adressant au prévenu, déclare :

« On sait qu'il y a deux personnes en vous : la personne bien, qui pleure, qui veut s'en sortir et la bête furieuse, à qui le premier verre donne le top départ. »

« On ne peut pas marchander, alors comment juger ? En fonction du préjudice, du passé judiciaire », ajoute-t-il.

Le trentenaire est condamné à une peine de sept mois de prison avec maintien en détention, interdiction de paraître sur la commune d'habitation de ses victimes et interdiction de porter une arme pendant cinq ans. Il devra payer à ses victimes la somme de 1.200 euros au titre des dommages et intérêts.

(*) Centre de soin, d'accompagnement et de prévention en addictologie

Daniel Lauret